L’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme invite le juge administratif à surseoir à statuer sur le recours dont il est saisi dirigé contre une autorisation d’urbanisme lorsque cette dernière est entachée d’un vice qui peut être régularisé.
Le Conseil d’Etat a précisé que :
Un vice entachant le bien-fondé de l’autorisation d’urbanisme est susceptible d’être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l’économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d’urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n’implique pas d’apporter à ce projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même.
CE, avis, Cne de SeignossE, 2 octobre 2020 (n° 438318, Publié au Lebon)
Qu’en est-il lorsque le vice qui affecte la légalité d’un permis de construire portant sur la réalisation de travaux sur une construction existante résulte de l’aggravation d’une non-conformité ?
Dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui, un pétitionnaire avait formé le projet de surélever trois bâtiments distincts.
Ces trois bâtiments étaient, dans leur état existant, non-conformes à la règle posée par l’article 8 du règlement du plan local d’urbanisme, laquelle imposait une distance au moins égale à 4 mètres entre des bâtiments non-contigus.
Conscient de la non-conformité préexistante, le porteur de projet devait cependant prévoir une « jonction », semble-t-il artificielle, pour tenter de rendre ces trois bâtiments contigus.
Le juge n’adhère pas vraiment à cette argumentation et considère que ces trois bâtiments ne sont pas contigus. Puis, il constate que la distance qui les sépare est inférieure à 4 mètres. Aussi, le projet, qui autorise leur surélévation, n’est ni étranger à la règle méconnue, ni de nature à améliorer la conformité.
Le permis apparaît donc avoir été délivré en méconnaissance de l’article 8.
Se posait, en second lieu, la question du caractère régularisable de ce vice.
Le Conseil d’Etat tranche ainsi :
En jugeant, pour rejeter les conclusions présentées par la commune de Montferrier-sur-Lez et la société RB Groupe tendant à l’application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, que le vice tenant à la méconnaissance de l’article UC 8 du règlement du plan local d’urbanisme n’était, eu égard à la circonstance que le projet portait sur la surélévation de bâtiments existants, pas susceptible d’être régularisé sans remettre en cause la nature même du projet, le tribunal a porté sur les pièces du dossier une appréciation souveraine exempte de dénaturation et n’a pas commis d’erreur de droit.
CE, 3 août 2022, commune de Montferrier-sur-Lez, n° 459436
En résumé, si la régularisation implique de démolir des bâtiments existants afin de faire en sorte qu’ils respectent, une fois reconstruits, les règles d’implantation, alors elle est de nature à porter au projet un bouleversement tel qu’elle en changerait la nature.